LESCOP
« Une froideur extravagante »
Treize ans après son hit « La Forêt », huit ans après son deuxième album, Mathieu Peudupin alias Lescop revient avec dix nouvelles chansons de cette pop synthétique sombre qu’il incarne de sa présence magnétique.
Comment est né ton troisième album ?
Tous mes albums ont été réalisés de la même façon : j’écris et compose les morceaux. Puis, je confie la réalisation à quelqu’un de confiance. Pour celui-ci, l’écriture s’est faite sur cinq ou six ans, le temps de trouver le bon interlocuteur en la personne de Thibault Frisoni. Il a emmené les chansons où je voulais mais aussi là où je n’avais pas imaginé qu’elles puissent aller. C’est le signe des meilleures collaborations.
À l’heure où les artistes se doivent d’être constamment présents avec de nouveaux titres, tu prends beaucoup de temps…
Le processus de réalisation du disque s’est étalé sur un an, certains trouvent cela lent, je trouve ce temps normal. Je suis quelqu’un de lent et je trouve que c’est une qualité. « Ton moulin va trop vite » comme le dit la chanson. C’est essentiel dans un processus créatif de prendre le temps, de réfléchir, d’écouter.
Le fait d’être entouré d’un groupe sur scène n’a rien changé à ton écriture ?
Mes concerts ont effectivement imprimé une idée de groupe dans la tête du public mais il n’y en a pas autour de Lescop. Après, des musiciens peuvent passer en studio, comme le guitariste Adrien Edeline qui joue aussi avec moi dans le groupe Serpent. Mais aucun de mes albums n’a été réalisé en groupe. Sur cette tournée, les musiciens sont d’ailleurs différents par rapport aux précédentes.
Depuis ton groupe rock Asyl formé à la Rochelle dans les années 90, puis ta carrière solo lancée en 2010, comment sens-tu ton style évoluer ?
Mon écriture s’inscrit dans une continuité, un fil reconnaissable et cohérent. Ce style, je l’ai peaufiné et affirmé. Quand je me suis lancé en solo après Asyl, j’avais plus de chance que l’histoire se termine. J’ai joué une troisième mi-temps qui dure encore. Sur ce premier album, j’ai affirmé quelque chose qui était dans la tête de pas mal de gens. Avec des artistes comme La Femme, Aline ou Yan Wagner, je faisais partie d’une génération d’artistes indie-pop jusque-là invisible. Des chansons comme « La Forêt » ou « Sur la planche » de La Femme ont immédiatement parlé à un public. Mon histoire vient de là, du punk. Tout ce que je fais descend du milieu punk alternatif, de l’indé français, et je l’ai affirmé d’une manière différente. Une sorte de chanson française post-punk, dans un équilibre de froideur extravagante. Je veux défendre ce milieu autrefois marginal, qui est devenu visible. De cette scène sont nés des artistes comme Flavien Berger ou Eloi. Mon écriture, mon savoir-faire vont toujours dans ce sens et je continuerai de les défendre.
Interview Pascal BERTIN
En concert : le 14 mars à Niort (Le Hangar)