En plein vol ! Rencontre avec l'équipe de voltige de l'armée de l'air et de l'espace

En plein vol !
Rencontre avec l’équipe de voltige de l’armée de l’air et de l’espace

Du 3 au 7 juillet se déroulait, sur l’aérodrome de Niort, le championnat de France monoplace de voltige aérienne. Une compétition partagée par de nombreux passionnés et professionnels, parmi lesquels les pilotes de l’armée de l’air et de l’espace, que nous avons rencontrés sur le tarmac.

Lieutenant-colonel Aurélien Hazet, vous êtes le directeur des équipes de présentation de l’armée de l’air et de l’espace. Pouvez-vous faire un tour d’horizon de la compétition et des personnalités présentes à Niort ?

L’équipe de voltige de l’armée de l’air et de l’espace, ici présente, forme avec la Patrouille de France une unité dont la particularité est d’effectuer des présentations en vol toute l’année, lors de meetings aériens notamment. C’est leur mission permanente. Pour l’équipe de haute voltige en particulier, créée en 1968, non seulement elle participe à des meetings, mais également à des championnats comme celui-ci. Car la voltige est un sport de compétition, et c’est là la raison de sa présence à Niort cette semaine.

Les pilotes de l’équipe de l’armée de l’air et de l’espace ont participé à la compétition dans la catégorie « Elite », la plus élevée dans la discipline. Dans cette unité, qui est une unité de l’armée de l’air, tous sont militaires. Ils ont eu une carrière, auparavant, dans le transport aérien, en tant que pilotes de chasse… Et pendant un certain nombre d’années, ils vont, au sein de cette équipe, réaliser différentes missions de présentation, dans des événements nationaux et internationaux, allant à la rencontre du public et représentant, comme la patrouille de France, notre pays à l’étranger.

Capitaine Alexandre Orlowski, vous êtes pilote au sein de cette équipe de voltige depuis 2011. Champion du monde individuel en 2015, champion du monde par équipe plusieurs années de suite depuis 2015, vice-champion du monde en 2019 et 2022. Comment avez-vous préparé cette compétition ?

Nous sommes arrivés dimanche (3 juillet, ndlr) pour débuter les vols initiaux le lundi. Malheureusement, les conditions météorologiques n’étaient pas idéales, à la fois pour le plafond, le vent, et les vols n’ont pu commencer qu’à partir de mercredi. Nous avons quand même réussi à passer trois programmes sur quatre, ce qui est très bien.

La compétition quant à elle va se terminer cet après-midi (vendredi 7 juillet, ndlr). Il reste encore quelques concurrents à passer, dont certains de notre catégorie. Nous attendons la fin des vols pour avoir les résultats définitifs. Cela reste une belle compétition pour tous les membres de l’équipe, venus avec des objectifs d’accomplissement et de résultats différents : certains jouaient une place en équipe de France, d’autres la victoire ici à Niort… Globalement tous les pilotes ont donné le meilleur sur chaque programme et sont satisfaits de la prestation qu’ils ont donnée.

Vous faites partie de l’équipe de voltige depuis bientôt douze ans. Avez-vous tous eu le même parcours ou venez-vous d’horizons différents ?

Alexandre Orlowski : Notre similarité, c’est que nous sommes tous pilotes militaires. Nous sommes entrés dans l’armée de l’air et de l’espace pour être pilotes. Nous avons un parcours sensiblement identique mais avec des spécificités diverses : parmi nous, certains sont issus de la chasse, d’autres du transport comme le capitaine Florent Oddon. Le capitaine Victor Lalloué a fait les deux, et le capitaine Geoffrey Denis a fait de la chasse et aussi de l’instruction en école. Les pilotes restent entre sept et dix ans au sein de l’équipe. C’est mon cas, en effet, depuis douze ans, et je la quitte cette année. Cela fera huit ans pour le capitaine Alloué, cinq ans pour le capitaine Oddon et quatre ans pour le capitaine Denis. Cinq années, c’est le temps minimum pour être performant, surtout sur le plan compétitif.

Vous avez donc chacun plusieurs milliers d’heures de vol à votre actif ?

Alexandre Orlowski : Oui, plus ou moins 3 000 heures de vol, à cinq cents heures près. Il faut savoir que les pilotes, lorsqu’ils rentrent à l’école de voltige, sont depuis vingt à vingt-cinq ans au sein de l’institution, et ont déjà une dizaine d’années d’ancienneté avant d’intégrer l’équipe. Ils sont au milieu de leur carrière professionnelle.

La voltige est, au sein de l’aviation, une niche, et un sport que peu de passionnés peuvent pratiquer…

Alexandre Orlowski : Oui. La plupart des pilotes que nous avons ici sont des pilotes civils, issus d’aéroclubs ou de structures privées. Au sein de l’armée de l’air, la voltige se pratique depuis plus d’un demi-siècle maintenant. Traditionnellement, la France est le berceau de cette discipline, et l’armée de l’air, comme la plupart des institutions de la Défense, est très axée sur le domaine du sport de haut niveau. Il n’y a pas que des militaires voltigeurs, il existe des militaires parachutistes, et beaucoup d’athlètes sont également militaires. Il était donc logique d’avoir, au sein de l’armée de l’air, cette équipe de voltige.

Quelles qualités faut-il avoir pour être voltigeur ? Au niveau physique, mais mental également ?

Alexandre Orlowski : En premier lieu, je dirais qu’il faut avoir la passion. On ne vient pas à la voltige par hasard. En général, les pilotes ont eu l’occasion de goûter à des vols de voltige avant et ont accroché. Après, il faut être persévérant, savoir se projeter sur le temps long, car les marches sont assez difficiles à gravir et nécessitent un gros investissement.

Je compare souvent cela à un art martial : il faut aimer répéter plusieurs fois les mêmes gestes, rechercher la technique la plus parfaite possible dans des conditions changeantes. Arriver à une telle régularité, cela se fait dans le temps, avec l’expérience… Il faut également de l’endurance physique – car ce sont des vols éprouvants – beaucoup de concentration et de précision dans la gestuelle, et une bonne mémoire.

La voltige, en plus de tout cela, doit demander une réelle cohésion d’équipe…

Alexandre Orlowski : En effet, la voltige est un vrai travail d’équipe. Quand nous volons, nous sommes seuls dans l’avion, sauf lors de démonstrations à deux avions, mais même seuls nous nous donnons les informations entre pilotes : les perceptions en vol, par rapport aux conditions météo, le programme… Nous sommes coéquipiers et concurrents au sein de la même équipe, cela crée de l’émulation.

On a l’habitude de dire que c’est un sport individuel qui se pratique en équipe, et c’est le cas également pour les pilotes civils. Certains d’entre eux vont d’ailleurs intégrer l’équipe de France de voltige qui va représenter la France lors des prochains championnats d’Europe en Italie, et nous allons, à cette occasion, mixer les pilotes civils et militaires. Nous espérons, à la fin de la compétition, qu’un Français sortira vainqueur, mais nous n’oublions pas pour autant ce côté collectif qui nous est propre. La cohésion, l’émulation, que l’on retrouve chez les militaires, portent les pilotes vers le haut.

Au-delà de la compétition, vous êtes, tout au long de l’année, les ambassadeurs de la France à l’étranger. Est-ce un rôle important pour vous ?

Alexandre Orlowski : Nous avons, c’est vrai, un rôle d’ambassadeur, qui est double : l’équipe est, premièrement, ambassadrice de l’armée de l’air et de l’espace. Nous serons d’ailleurs le 14 juillet sur les Champs Elysées et participeront aux nombreux meetings à venir. Mais l’équipe est aussi ambassadrice de notre pays. Car au-delà de l’équipe de France, c’est la France que nous représentons en tant que nation aéronautique. Et ce rôle est porté par tous les pilotes, qu’ils soient civils ou militaires.

Interview: @ludovic_rhode

Crédit photo: @lambert.davis