Samy Dion L’art de réinventer les cartes

Samy Dion
L’art de réinventer les cartes


Passionné de dessin et de l’univers fantastique depuis son enfance, Samy Dion redessine, à sa manière, des cartes de villes qui l’ont particulièrement touché. Non, ce n’est pas un cartographe ou un topographe, c’est bien un artiste qui a réussi à faire de son rêve une réalité en ouvrant “Les 7 lieux”, un endroit magique qui plaira à tous les grands enfants.

Dessiner des cartes manuellement ce n’est pas forcément un métier très commun, comment est arrivée votre envie de dessiner des cartes ?

J’ai toujours beaucoup aimé dessiner. Après avoir vécu à Paris, je suis descendu à La Rochelle et j’ai remarqué qu’il y avait des cartes touristiques très simples, j’ai trouvé ça hyper intéressant, mais à la fois dommage qu’il n’y ait pas plus de détails. Alors ça m’a donné envie d’aller encore plus loin. Ça m’a permis de me familiariser avec cette ville que j’ai tout de suite aimée. J’aime voyager, j’aime dessiner alors je me suis dit pourquoi pas. Mais je reste avant tout un dessinateur, pas un cartographe.

Pourquoi Les 7 lieux ?

Alors, ça vient du conte de Charles Perrault. Les bottes de sept lieues.  Ce sont des bottes qui permettent d’emmener celui qui les porte où il veut, dans n’importe quel endroit. Ça m’a tout de suite parlé, j’ai trouvé le lien entre ce conte et ma passion. Avec ce nom et le jeu de mots qui va avec, on me découvre réellement. Au-delà d’être un passionné de voyage et de dessin, je lis beaucoup, j’ai beaucoup d’imagination et j’adore l’univers fantastique. Ça me permettait vraiment d’allier habilement la culture populaire avec des éléments plus littéraires. Et puis ma compagne est aussi très fan de l’univers d’Harry Potter, avec plein d’objets magiques dont la carte du maraudeur, donc ça faisait plaisir à tout le monde (rires)

Quelles sont vos principales sources d’inspiration ?

Je suis inspiré par ce qui m’entoure, par la ville, la région et c’est ça que j’aime, je lève les yeux, je regarde à gauche, à droite en me baladant et je trouve des éléments qui m’inspirent et que je vais mettre dans la carte.

Vous vous rendez dans la ville que vous allez dessiner ou vous la voyez par le biais de photos, d’images ?

Je réalise souvent des villes que je connais très bien donc je n’ai pas forcément besoin de me déplacer, Google Map, c’est vraiment mon outil phare, ça me permet de voir la ville en plusieurs dimensions, l’architecture extérieure. Mais c’est vrai que j’aime aussi aller sur place, je suis un grand voyageur donc ça me donne une excuse pour faire ce que j’aime. 

On vous demande de venir dans la ville pour réaliser une carte ou est-ce que c’est vous qui décidez quand et où aller ?

Je choisis les villes que j’ai envie de dessiner avec le cœur. Saint Malo, c’est parce que j’ai des amis bretons, mais aussi par conseils des gens. Alors, oui, souvent, c’est moi qui décide dans quelle ville aller, mais ça m’est déjà arrivé d’avoir des commandes d’un particulier. Je contacte aussi l’office de tourisme de certaines villes et je leur demande s’ils sont intéressés par mon travail, comme ça, ils peuvent afficher la carte dans un lieu public et ça permet de redécorer leur ville, de la colorer et de lui rendre sa beauté quelque part.

 Comment choisissez-vous les éléments à inclure ou à exclure d’une carte ?                                

Je ne veux pas forcément que mon travail soit le plus précis possible. On me dit souvent “oui Samy t’a oublié ça, pourquoi t’a pas mis ça” mais je ne peux pas satisfaire tout le monde. Dessiner, c’est avant tout pour moi de l’amusement, j’inclus les éléments qui ont du sens pour moi. Ça dépend aussi de la ville. A Paris, j’ai beaucoup plus de souvenirs, alors évidemment, je dessine des endroits qui sont nostalgiques. J’aime travailler avec les gens et écouter leurs conseils, mais mon dessin reste personnel. Je suis mes propres envies et ça, personne ne pourra me l’enlever.

Ça doit prendre pas mal de temps de tout dessiner, il vous faut combien de temps en moyenne pour créer la carte d’une ville ?

Ça dépend vraiment de la ville. Souvent, je mets à peu près 120 heures pour que tout soit bien réalisé. Mais à mes débuts quand j’ai commencé par la carte de La Rochelle, je travaillais vraiment complètement tout seul et c’était une nouvelle activité pour moi, donc oui, j’avais mis 6 mois pour celle-là. Donc je dirais que ça dépend de la densité de la ville et des bâtiments. Quand j’ai dessiné Paris, j’ai mis beaucoup plus de temps que Saint-Malo et c’est normal parce que c’est vraiment très détaillé, que ce soit au niveau des rues ou des bâtiments.

Y-a-t-il une partie plus difficile à réaliser?                             

Pas vraiment mais justement j’aime beaucoup les défis, les challenges. Quand tout est rectiligne, ça m’ennuie beaucoup. Il faut que ça bouge, qu’il y ait de la densité. Ça me permet de m’immerger et c’est un moyen amusant pour les autres de se plonger dans la ville, de la redécouvrir à ma façon. 

Est-ce que vous êtes dans un système entrepreneurial ?

Au début de mon travail, je n’étais pas encore dans un système d’entreprise, j’allais là où étaient les copains. Mais je ne peux pas me permettre de vendre mes cartes en dessous d’un certain prix, le temps de travail est déjà très long. Comme je l’ai dit, si je dois réaliser des cartes de Rome ou d’une autre ville assez grande et similaire en termes d’impact culturel, je vais forcément augmenter mes prix pour celle-ci, en particulier si c’est une commande. Le travail sera colossal. Mais il faut aussi que je m’aligne au prix du marché pour pouvoir manger (rires)

 Vous étiez déjà venu à Niort avant de réaliser cette carte ?                                                               

Ah oui énormément de fois, j’habite à La Rochelle donc souvent on se balade à Niort, on fait aussi le marché sur la place. J’aime beaucoup cette ville et c’est pour ça que j’ai décidé de la dessiner. J’avais quand même hésité entre trois villes (Niort, Saintes et Rochefort), mais c’est finalement Niort qui a gagné haut la main et ça me fait plaisir de la dessiner. 

Y-a-t-il une ville en particulier que vous rêviez ou que vous aimeriez vraiment faire ?              J’aimerais beaucoup faire la carte d’une ville comme Aix-en-Provence. Ca ne ressemble pas vraiment aux cartes que j’ai pu réaliser, donc moi ça me réjouit, il y aura encore plus de challenges comme ça. Sinon à l’international, j’aime beaucoup Bruxelles ou alors Rome. Ce sont des villes qui me font rêver, mais c’est sûr que si je les réalise, il va falloir que je porte ma casquette d’entrepreneur, c’est un truc que je suis malheureusement obligé de faire quelques fois pour continuer à vivre de ma passion.

Est-ce que vous avez des conseils pour des jeunes artistes qui rêveraient comme vous d’ouvrir leur propre entreprise et se lancer dans un domaine plutôt original mais qui n’osent pas ?  

Je leur dirais de se lancer, mais de faire gaffe. C’est très compliqué de vivre du métier d’artiste, depuis toujours, et ça continue encore maintenant. Il y a des talents qui ne sont pas reconnus et malheureusement, on ne peut pas toujours vivre que de sa passion. Moi, quand j’ai commencé, j’ai galéré, ce n’était pas facile, c’est sûr, mais je me suis lancé. Donc je pense que c’est important d’avoir une sécurité derrière, en tout cas au commencement. Il faut faire des compromis entre ce qu’on aime et la réalité. 

CRÉDITS :

Interview @ines.mmni

Photos : @DR

@lesseptlieux