Le Centre national des arts de la rue et de l'espace public sur le pont à La Rochelle

Le Centre national des arts de la rue et de l’espace public sur le pont à La Rochelle

À Niort, tout le monde se souvient encore de la déambulation participative dansée de la compagnie Artonik, « The Color of Time ». Ce jeudi 12 septembre 2013, le ciel niortais avait connu un véritable feu d’artifice de poudres colorées, inspiré de la Holi, la traditionnelle fête des couleurs hindoue. C’était l’époque où le Cnarep (Centre national des arts de la rue et de l’espace public), le seul de la région Nouvelle-Aquitaine sur les 13 nationaux, était encore installé aux Usines Boinot, entre 2011 et 2015, jusqu’à ce que la Ville, après un changement d’équipe municipale, décide de ne pas renouveler la convention pluriannuelle d’objectifs, pour raisons financières. Une décision qui a motivé le déménagement du Cnarep à La Rochelle en 2016. Après une période de transition, la structure culturelle, devenue le « Cnarep Sur le Pont », s’est bien intégrée dans le paysage rochelais. Bruno de Beaufort, le directeur, et Anna Guillou, la responsable de la communication, font le point.

Est-ce que ce déménagement imposé a été un nouveau départ pour le Cnarep ?

Bruno de Beaufort : On a d’abord changé de nom car on était au départ sur une passerelle entre deux ports d’attache. On a donc dû aller chercher des espaces de travail intérieur et extérieur pour accueillir les artistes en résidence. Cela a été intéressant de découvrir les lieux, les partenaires… La Rochelle marque notre deuxième envol. On est reparti à zéro avec l’expérience de Niort, qui a été intéressante.

Votre activité à La Rochelle est-elle différente de celle que vous aviez à Niort ?

BdB : Le projet rochelais du Cnarep est en effet différent de celui de Niort. Le cahier des charges du label national est toujours le même, à savoir accueillir des artistes en résidence, participer à la construction des créations et participer à leur diffusion. C’est la rencontre avec les artistes qui est intéressante, surtout pour les personnes qui ne vont pas dans les lieux culturels. On continue de le faire à La Rochelle. Mais à Niort, il s’agissait plus d’une succession de résidences et de sorties de résidence. Il n’y avait pas de saison à proprement dit. Et on nous avait demandé de ne pas proposer de temps forts car d’autres existaient déjà. On travaillait en étroite collaboration avec le festival des arts de la rue Coup de chauffe de Cognac.

À Niort, on allait aussi à la rencontre des scolaires. En 2012-2013, on avait constitué une classe à horaires aménagés arts de la rue (CHAR) dans un collège avec un public socialement mixte. On avait déjà ce rapport à l’éducation artistique et culturelle. On continue de le faire avec le collège André-Malraux de Châtelaillon-Plage depuis 2018.

Vous êtes actuellement dans votre deuxième convention pluriannuelle d’objectifs signée avec l’État, la Région et la Ville (2022-2025). Que dressez-vous comme bilan de votre vie rochelaise ?

BdB : On propose davantage de déambulations. Peut-être parce que La Rochelle est une ville un peu plus touristique que Niort. La visibilité du Cnarep était compliquée à créer sans temps forts. Et c’est ce qui a changé à La Rochelle. Notre projet était de proposer une saison identifiée, d’octobre à juin car, l’été, il y a déjà beaucoup de choses. Aujourd’hui, on a une vraie plaquette.

Anna Guillou : On a proposé deux temps forts par an, en mai et en octobre, jusqu’au Covid. En 2020 et 2021, les deux temps forts ont été regroupés en octobre. Désormais, on organise uniquement des résidences en octobre. Mais on a gardé le rendez-vous de mai.

Réussissez-vous à trouver votre place dans une ville où les propositions culturelles ne manquent pas ?

BdB : Il nous a fallu beaucoup plus faire notre place à La Rochelle. Niort est un lieu emblématique des arts de la rue, il y a beaucoup de compagnies. Le public est demandeur. Alors qu’à La Rochelle, c’est très touristique. Quand on arrive avec des choses un peu décalées, ce n’est pas habituel. On fait un pas de côté, on raconte la ville autrement. Et parfois cela peut interloquer, interpeller.

AG : La saison précédente, on a accueilli 26 compagnies, comme à Niort, la moitié de la région, la moitié venant de l’extérieur, et 107 représentations. La différence par rapport à Niort, c’est qu’on s’est ouvert à l’agglomération avec les Transhumances littorales – les arts de la rue en commun.es depuis 2022. La troisième édition aura lieu dans neuf communes de mai à juillet 2024. Au-delà de la programmation des spectacles, certaines communes s’impliquent dans les créations en étant co-productrices. La commune de Puilboreau soutient la Hop Hop Compagnie et son « Chantier interdit au public ». Périgny soutient la Compagnie Point Bart et sa création « Fièvre » et Lagord soutient La Baleine Cargo et ses « Furtives ».

Et vous avez noué de nombreux partenariats…

BdB : On aime croiser les disciplines. On a travaillé avec l’espace de musiques actuelles La Sirène, le Centre chorégraphique national (CCN) Mille Plateaux… Ce côté partenariat est important pour mutualiser les moyens et créer des rencontres avec d’autres publics. Finalement, le fait d’être nomade depuis quelques années et cette volonté de trouver des partenariats nous ont permis de mieux connaître La Rochelle que beaucoup de structures qui invitent les artistes et le public dans leurs propres lieux.

Vous allez bientôt emménager au Studio 900, dans une partie de l’Encan située entre l’espace de congrès et le Musée maritime, soit 900 mètres carrés dans cette ancienne halle à poissons.

BdB : C’est un très bel espace de travail que nous devrions investir à l’horizon 2025. Et le quartier est en train de se développer. Cela devient une extension du centre-ville avec la réfection de la gare, l’université à proximité, la place Bernard-Moitessier… Ce sont des lieux plein de potentiel.

Vous souhaitez conserver malgré tout une présence auprès des habitants et dans les quartiers.

BdB : Quand on a écrit le projet de la nouvelle convention pour 2022-2025, on a décidé d’insister sur le quartier de Mireuil, plutôt que de saupoudrer nos actions, et sur le lien avec les habitants. Le spectacle « La Cabane à Plume(s) » de la compagnie l’Homme debout de Poitiers, présenté en juin 2023, avec sa marionnette de 7 mètres, qui a impliqué les quartiers de Mireuil et de Villeneuve-les-Salines, en est un parfait exemple. Le centre socioculturel Le Pertuis de Mireuil est devenu un partenaire important, avec qui on a imaginé le festival Le Pertuis fait son cirque. La prochaine édition de cette biennale aura lieu du 5 au 7 juillet 2024. Nous allons également travailler avec le groupe scolaire des Grandes Varennes et la compagnie Jeanne Simone sur le projet d’immersion artistique « Gommette ».

Quels sont les prochains temps forts 2024 du Cnarep Sur le Pont ?

AG : La compagnie Mash-Up Production va venir en résidence fin mars pour travailler sur sa nouvelle création « Sauver Richard ». Le Collectif Xanadou travaillera en avril sur son nouveau spectacle « Road movie sur place & sans caméra ». Dans le cadre de sa résidence, il présentera « Spen & Lulla ». Le Grand Colossal Théâtre, de région parisienne, présentera le deuxième épisode de sa série « La Chienlit », « Feu Mme Singer », le 3 mai. Le troisième volet « Enterre-moi partout » sera joué durant Fêtes le pont qui aura lieu du 7 au 9 juin.

CRÉDITS

www.cnarsurlepont.fr

www.facebook.com/cnarsurlepont

www.instagram.com/cnarep_surlepont

YouTube : Cnarep sur le Pont

Interview @JDelrieux

Crédit photo @Antoine Jacquelin @Erik Damiano @Caroline Bazin @Collectif Xanadou @Francis Azevedo